L’économie sociale et solidaire, c’est quoi ?

L'économie sociale

et solidaire

Qu'est-ce que c'est ?

Par Alexandra Pierré-Caps

Si vous pensez que l’économie sociale et solidaire se résume à l’achat, à prix libre, d’un sarouel en patchwork upcyclé ou d’une bouteille de vinaigre de kombucha artisanal* sur un marché ariégeois un samedi matin, il est temps de reprendre quelques fondamentaux sur le sujet

Ça tombe bien, nous sommes en novembre et novembre, c’est, certes, le mois sans tabac ou Movember, mais c’est également le mois de l’économie sociale et solidaire.
 
Prévu les 24 et 25 novembre prochains à Nancy, l’événement du « Village des solutions de demain » fait partie de ces initiatives des territoires visant à promouvoir des modèles économiques vertueux, fondés sur des logiques de solidarité et de coopération.
Alors en attendant d’y retrouver Agoraa et d’y rencontrer celles et ceux qui souhaitent penser l’économie autrement, je vous propose un test simple : savez-vous exactement ce qu’est l’économie sociale et solidaire ?

*alors oui, le vinaigre de kombucha existe, et je ne vous propose même pas la recette du site Révolution Fermentation (!) parce qu’elle est – curieusement – très mal notée.

L’ESS, pour les intimes

L’économie sociale et solidaire est en premier lieu encadrée par la loi du 31 juillet 2014 ; sur le site du Ministère de lÉconomie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique de la France (oui, je dois tout dire), on peut lire que l’économie sociale et solidaire désigne « un ensemble dentreprises organisées sous forme de coopératives, mutuelles, associations, ou fondations, dont le fonctionnement interne et les activités sont fondés sur un principe de solidarité et d’utilité sociale » (Source).
 
Vous allez certainement me dire que rien ne s’oppose à ce que mes hippies ariégeois soient finalement concernés par cette définition. À la vérité, l’économie sociale et solidaire repose sur des valeurs de solidarité, de coopération et de durabilité, et vise tout d’abord à améliorer la qualité de vie des individus tout en contribuant au bien-être collectif. Pour ce faire, ne vaut-il pas mieux s’inscrire dans le monde plutôt qu’à sa marge ?

Un pour tous…

L’économie sociale et solidaire se distingue des principes de l’économie traditionnelle par sa finalité.

Au lieu de maximiser les profits pour les actionnaires, par exemple, elle cherche avant tout à répondre à des besoins sociaux ou environnementaux collectifs.

Elle s’emploie à valoriser des modes de gouvernances démocratiques favorisant la prise de décision collégiale et la transparence.

Enfin, elle promeut les partenariats, la mutualisation des ressources et la solidarité entre les acteurs.

 

Ainsi les profits individuels sont-ils proscrits du système et les bénéfices réinvestis pour répondre aux besoins de la communauté.

 

D’accord, donc dans l’économie sociale et solidaire, « les gens sont communistes, déjà, ils ont froid, avec des chapeaux gris, et des chaussures à fermeture éclair » ? (OSS 117, Rio ne répond plus pour celles et ceux qui n’auraient pas la référence.)

 

Pas tout à fait. L’économie sociale et solidaire est, certes, engagée pour la promotion de valeurs sociales et environnementales mais sans renoncer à la notion de performance économique.

L'ESS 🇫🇷 en quelques chiffres :

0 k
Entreprises immatriculées
0 M
Salariés
0 %
PIB français

Quelques exemples concrets (non, c’est un pléonasme)

En cela, les coopératives sont un bon exemple.

Et pas seulement celles qui vous fournissent en BiB de Côtes-de-Provence pour vos soirées estivales.

 

Connaissez-vous, par exemple, la Batelière, à Nancy (54) ? La Batelière est une entreprise de pompes funèbres écologiques, citoyenne et solidaire. Eh oui, quand on est convaincu ou militant, il n’y a pas de raisons que cela s’arrête à la mort (on se met des obstacles bêtement, parfois…).

La Batelière se donne pour mission, dans une gestion désintéressée, de « redonner du sens à l’adieu » en proposant notamment de réfléchir à l’impact des funérailles sur l’environnement.

Prenez mon grand-oncle vosgien, par exemple ; il est décédé dans sa maison de retraite de Nice mais il voulait absolument se faire enterrer en Lorraine… Bilan, 1000km et 8000 euros, BREF.

Pour ce genre de cas, La Batelière met à disposition de ses clients un réseau d’acteurs locaux et/ou engagés, ainsi que de bénévoles permettant aux plus précaires d’être soulagés de l’angoisse du financement et de l’organisation dobsèques qui viennent, dans ces cas, s’ajouter à la douleur d’une perte.

 

Son format de coopérative permet à chacune et chacun de l’intégrer alors même qu’elle propose ses services à toutes et tous, sociétaires ou non.

 

Elle est pas belle, la mort ?

© La Batelière

Les entreprises sociales ont parfois des statuts plus traditionnels, tout en faisant de l’engagement social et environnemental leur essence même ; c’est le cas du chausseur TOMS, né en Californie (attention, je vous vois revenir avec les hippies), qui, pour chaque vente, finance des ONG qui se consacrent au soin de la santé mentale dans plusieurs pays du monde.

La gestion de ce type d’entreprises nécessite une formation particulière, désormais proposée dans des formations universitaires spécifiques, comme au sein du Master bien nommé Entreprises de l’économie sociale et solidaire dispensé à l’Université de Lorraine, par exemple.

Enfin, ces structures requièrent un accompagnement financier adapté de la part de banques éthiques et solidaires qui connaissent les projets et entreprises concernés et proposent en conséquence des investissements induisant un impact positif sur la société et lenvironnement.

Ainsi la coopérative bancaire de la Nef, en France, mise-t-elle sur les projets participant d’un modèle de société plus juste et plus durable.


Née en 1988 (comme moi, coïncidence ?), elle a lancé en 2022 une levée de fonds de 30 millions d’euros pour atteindre l’autonomie (la comparaison avec moi s’arrête là).

Le crowdfunding, ou financement participatif, fait également des outils de financement plébiscité par le milieu, en permettant des échanges de fonds entre individus hors des circuits financiers institutionnels.


Le même esprit anime également certaines mutuelles et compagnies d’assurance (si, si, je vous jure). Ces organisations offrent alors des services d’assurance avec une approche solidaire, où les membres cotisent pour se soutenir mutuellement en cas de besoin. La MAIF, en France, qui se présente comme un « assureur militant » est un exemple français bien connu (même s’ils m’ont quand même collé un malus en 2019 alors que le sinistre n’était pas exactement de ma faute, mais je vous raconterai cela une autre fois).

Vous pourriez cependant m’objecter que ces vœux pieux ne nous sortent pas pour autant des orties car les inégalités sociales demeurent et se renforcent et la crise environnementale et climatique est là, sans discussion.

 

Mais justement, connaissez-vous Lortie, à Malzéville, dans la banlieue de Nancy ? Lortie est une association d’insertion qui lutte contre la précarité et l’exclusion en assurant un salaire à plus de 30 femmes et hommes éloignés de l’emploi, dans le cadre d’une agriculture maraîchère périurbaine bio.

Sur le même principe qu’une AMAP, elle permet à toutes et tous, par son magasin et ses paniers hebdomadaires, de consommer des fruits et légumes bio frais.

Elle déploie également un marché solidaire chaque semaine permettant aux habitants modestes du quartier voisin de s’approvisionner en légumes et autre produits bio, tout en bénéficiant de remises sur les prix classiques.

Mais ça n’est là que la face émergée de l’iceberg, puisqu’elle anime, entre autres, des ateliers jardins chaque semaine au sein de la maison d’arrêt de Nancy-Maxéville et au sein du centre de semi-liberté de Maxéville.

En conclusion

© Adobe Stock

Bref, l’économie sociale et solidaire, c’est avant tout la volonté de replacer le collectif au centre des préoccupations économiques et environnementales, de renoncer au profit individuel pour servir le « bien commun », une notion largement investie par les philosophes grecs de l’Antiquité par exemple, comme Platon ou Aristote, qui s’interrogeaient déjà sur ce qui fait de nous des êtres sociaux (sauf, parfois, un dimanche pluvieux sous le plaid devant Netflix), et plus largement ce qui nous unit en tant que communauté.

L’exploitation raisonnée de nos richesses et notre destin environnemental et climatique est peut-être un élément de réponse.

Zoom sur :

Le Village des Solutions de Demain 2023

Visuel © Département de Meurthe & Moselle

À l’occasion du Le mois de l’économie sociale et solidaire, le Conseil départemental de Meurthe-et-Moselle et ses partenaires vous donnent rendez-vous les 24 et 25 novembre 2023 à l’Hôtel du Département à Nancy pour la deuxième édition du Village des Solutions de Demain, un événement mettant en lumière la contribution des acteurs de l’ESS et des entrepreneurs engagés à la bonne marche de l’économie et de la société
 
Agoraa est partenaire de l’événement, permettant de cartographier tous les acteurs de l’ESS du Département !